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OPINIONS
Patient sevré, client perdu!Paru dans 24 Heures le 8 déc. 2009 Patient sevrĂ©, client perdu! Après la Fondation du Levant, c’est la Fondation des Oliviers qui doit courber l’échine devant les contraintes de l’Etat. Ces deux fondations avaient en commun une dĂ©marche: la guĂ©rison par l’abstinence; face aux drogues pour l’une, face Ă l’alcool, pour l’autre. «Le dĂ©bat doctrinaire autour de l’abstinence n’a pas d’intĂ©rĂŞt», dĂ©clare le conseiller d’Etat Pierre-Yves Maillard. C’est pourtant le cĹ“ur d’un dĂ©bat qui devrait justement prĂ©occuper notre ministre de la SantĂ©. L’évolution de la mĂ©decine contemporaine se caractĂ©rise par une formule: «Prendre en charge». De moins en moins, elle prĂ©tend guĂ©rir; de plus en plus, elle veut accompagner le patient dans un traitement appelĂ© Ă se prolonger jusqu’à son dernier souffle. Pour les toxicomanies, on renonce au sevrage au profit d’un accompagnement «à bas seuil». MĂŞme si le sevrage ne rĂ©ussit pas dans tous les cas, ceux au moins qui sont parvenus Ă l’abstinence sont guĂ©ris de leur maladie et n’ont plus besoin d’être «pris en charge». De mĂŞme pour d’autres maladies: un certain nombre d’hypertendus ou de diabĂ©tiques retrouvent des valeurs normales après avoir subi un rĂ©gime ou entrepris une activitĂ© sportive. Que ces mesures ne rĂ©ussissent pas dans tous les cas ne devrait pas conduire la mĂ©decine Ă y renoncer au profit de pilules Ă avaler «à vie». Telle est pourtant la tendance actuelle. La littĂ©rature mĂ©dicale abonde d’articles ventant un dĂ©pistage prĂ©coce et un traitement de longue durĂ©e. Mais rares sont les Ă©tudes qui chercheraient comment et quand un traitement peut ĂŞtre interrompu, un mĂ©dicament abandonnĂ©; l’abstinence mĂ©dicamenteuse n’intĂ©resse pas grand monde. Cette Ă©volution est la rĂ©sultante de trois forces convergentes. D’abord, l’idĂ©ologie de la gratuitĂ©: il devrait ĂŞtre possible de tout obtenir sans effort. L’abstinence, le rĂ©gime, l’exercice physique supposent un effort, mais l’effort n’est pas Ă la mode. Il est tellement plus facile d’absorber quelques pilules. Ensuite, l’ambition lĂ©gitime des professionnels de la santĂ© de faire le bonheur de leurs patients: une «prise en charge» de longue durĂ©e apparaĂ®t comme plus charitable qu’un traitement contraignant, limitĂ© dans le temps, qui rend le patient Ă sa propre responsabilitĂ©. Plus lucrative, aussi, parfois… Enfin, les intĂ©rĂŞts de l’industrie pharmaceutique, qui fait ses choux gras des traitements mĂ©dicamenteux perpĂ©tuels et n’a aucun intĂ©rĂŞt Ă soutenir les Ă©tudes qui pourraient proposer leur interruption. M. Maillard se trompe lorsqu’il considère le dĂ©bat autour de l’abstinence comme dĂ©nuĂ© d’intĂ©rĂŞt. En refusant d’appuyer les efforts faits par Le Levant et Les Oliviers pour promouvoir l’abstinence, il contribue Ă renforcer une mĂ©decine fondĂ©e sur la dĂ©pendance: dĂ©pendance Ă l’endroit de professionnels de la santĂ©, dĂ©pendance Ă l’endroit de systèmes de soins, dĂ©pendance Ă l’endroit de ces drogues lĂ©gales qu’on appelle mĂ©dicaments. Curieuse conception de la santĂ©! Notre ministre socialiste devrait se montrer plus critique Ă l’endroit de son administration, et Ă©couter un peu mieux la petite voix humaniste et libĂ©rale qui murmure en lui. Jacques-AndrĂ© Haury |
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