Jacques-André Haury Jacques-André Haury - médecin et député
Jacques-André Haury
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  ENVIRONNEMENT

Interdire pour assainir

Paru dans 24 Heures le 15 fév. 2008

Réduire nos émissions de CO2 passe par l’assainissement de notre parc immobilier et de notre parc automobile. L’autre solution serait de revenir au Moyen-Âge, à pied et sans chauffage, mais personne n’y songe sérieusement.

Pour y parvenir, il convient de distinguer deux cibles d’action: le neuf, d’une part, l’existant, d’autre part. Les avis sont divisés sur les moyens les plus efficaces permettant d’assainir ce qui existe.

En revanche, pour le neuf, c’est-à-dire pour les nouveaux bâtiments, pour les nouveaux véhicules, pour les nouveaux appareils électriques, le bon sens conduit à une solution et une seule: ne laisser entrer sur le marché que des produits qui respectent des standards d’économie d’énergie.

C’est le sens de l’initiative des jeunes Verts «Pour des véhicules plus respectueux des personnes»: ne plus immatriculer des véhicules dont les émissions de CO2 et d’autres polluants dépassent une limite définie par la loi. Le texte de l’initiative comporte quelques autres points, plus discutables. Mais la ligne est claire: pour obtenir un assainissement progressif du parc à véhicules, il faut commencer par ne plus mettre sur le marché des véhicules «sales».

Ecologie libérale a décidé d’appuyer cette initiative et de soutenir la récolte de signatures.

«Ecologie»: personne ne contestera l’intérêt écologique de cette démarche. Mais «libérale»? Des libéraux ne devraient-ils pas au contraire miser sur la responsabilité individuelle et considérer que chacun est libre de choisir la voiture qu’il veut, à condition qu’on lui applique le principe du «pollueur-payeur»? Autant le dire d’emblée, nous n’avons jamais été conquis par ce principe, parce qu’il est amoral. On ne peut à la légère adhérer à l’idée que celui qui commet un acte nuisible peut s’en tirer simplement en payant. Viendrait-il à quiconque l’idée de défendre le principe du «pédophile-payeur», qui prétendrait compenser son acte par de l’argent? Cette forme moderne de trafic des indulgences ne nous convainc pas davantage que sa forme historique. Puisqu’une consommation inutile d’énergie et une émission inutile de CO2 sont nuisibles, le but est de supprimer la nuisance, pas de la marchander.

Et la liberté de choisir son véhicule selon ses goûts, n’est-ce pas un objectif libéral? Dans un excellent article* intitulé «Armes, chiens, 4x4: tout n’est pas liberté fondamentale», Philippe Nantermod et Antoine Verdon rappellent que l’on ne saurait brandir le spectre d’une restriction fondamentale des droits de l’être humain à chaque fois que l’Etat lui interdit certaines fantaisies ou certains caprices. Les véhicules polluants font partie de ces caprices et les grands principes libéraux ne sont pas en cause ici. A titre d’exemple, lorsque la Suisse a interdit l’immatriculation des véhicules dépourvus de catalyseur, personne n’y a vu une restriction des «libertés fondamentales».

L’initiative des Jeunes Verts, en dépit de certaines maladresses que les Chambres fédérales pourront corriger en élaborant un contre-projet, fait partie des mesures que les gens raisonnables doivent soutenir sans aucune arrière-pensée. * Le Temps , 11 janvier 2007

Jacques-André Haury




 

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