Jacques-André Haury Jacques-André Haury - médecin et député
Jacques-André Haury
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  IDENTIFIONS LA CULTURE DE L'EXCUSE

Nous choisissons la responsabilité

Paru dans Forum Libéral le 5 mai 1998

Nous voulons l'homme responsable. Quelle est la pensée contraire ? Tony Blair l'a définie : c'est la "culture de l'excuse". Cette culture nous baigne à un point tel que nous n'y prenons plus garde. Essayons de la mettre en évidence en signalant certains shémas de pensée qui lui appartiennent.

Tout est "maladie"
L'homme responsable de ses actes, c'est celui qui en "répond". Pour qu'il soit excusable, il faut en faire un malade. Une des manifestations de la culture de l'excuse apparaît dans la façon d'aborder la toxicomanie. L'alcoolisme est une maladie. On parle des "victimes de l'alcoolisme" pour désigner non pas les proches ou les enfants d'un père alcoolique, mais l'alcoolique lui-même, que sa "maladie" condamne à boire. La consommation de drogues, pénalement, est un délit.

Mais notre code pénal ne correspond pas à la culture de l'excuse. C'est ainsi que M. Philippe Biéler écrivait récemment : "N'oublions pas que le toxicomane n'est pas un délinquant, mais un malade". Donc qu'il doit être excusé ! Nous ne prétendons pas que la vérité soit tout d'un côté ou tout de l'autre. Nous notons simplement que cette pensée tend à nier la responsabilité.

Tous sont victimes
Dans "La Tentation de l'innoncence", Pascal Bruckner invente le terme de "victimisation". La culture de l'excuse présente volontiers l'individu comme une victime. Ce qu'il est, peut-être. Mais cet état de victime devrait excuser tout comportement ultérieur. Pensons à tout de domaine des contraintes sexuelles. Elles peuvent être graves, certes, profondément traumatisantes. Mais faut-il en conclure que l'individu est condamné à n'être plus, toute sa vie, que la victime de l'affront reçu ? Que, toute sa vie, cette plaie servira d'excuse dans toutes les situations difficiles ? Dans la culture de la responsabilité, l'individu est appelé à faire face aux circonstances, avec le bagage d'expériences bonnes et mauvaises qui est le sien.

Tout est dans les gènes
Depuis longtemps, certains attribuent à l'hérédité une explication aux comportements humains. Il n'est pas étonnant que certains "chercheurs" croient en établir la preuve. La dernière découverte : le gène de la chance. Vous avez échoué vos examens : pas votre faute, il vous manquait le gène de la chance. Echec professionnel, échec conjugal : ne vous demandez pas si vous avez une part de responsabilité, il vous manquait un gène. Et la culture de l'excuse en sort renforcée.

Toute difficulté est injuste
La culture de l'excuse ne peut intégrer l'effort. Il suffit qu'un travail soit difficile pour qu'on soit en droit d'échouer. Qu'un enfant doive beaucoup travailler à l'école paraît déjà condamner l'enseignement. Il n'y a guère que le sport qui fasse exception. Ailleurs, tout devrait être facile. Lorsque les libéraux prenaient pour slogan "Retroussons nos manches", ils signifiaient que la difficulté méritait d'être affrontée. Dans la culture de l'excuse, elle est brandie comme une justification à l'abandon.

La faute aux autres
En cas de difficulté ou d'échec,  l'individu responsable s'interroge sur son rôle. Dans la culture de l'excuse, cette interrogation n'existe pas. L'explication est extérieure. La mondialisation est brandie chaque fois qu'une entreprise est en difficulté. La crise économique devrait expliquer tous les comportements individuels : violence, toxicomanie, démission parentale, etc. Il ne fait pas de doute que chacun, à titre individuel ou collectif, est influencé par des difficultés externes. Mais elles n'excusent pas tout. De plus, celui qui prend les autres pour excuse à ses difficultés n'a aucune raison - ni espoir - de tenter d'en sortir. 

Soyons attentifs
Les libéraux affirment appartenir à la culture de la responsabilité. Nous ne changerons pas facilement un état d'esprit assez largement dominant. Mais nous devons dénoncer la culture de l'excuse qui nous envahit. Dans l'affaire du gaspillage de l'aide sociale dans notre canton et à Lausanne, un assistant social déclarait : "On excuse tout comme de mauvais parents"(Le Temps, 17.4.98). Cette remarque est révélatrice de la cause profonde de certains dysfonctionnements de notre société. A nous d'identifier, puis de nous distancer de cette culture de l'excuse.


L'excuse ou le pardon
Notre religion chrétienne s'honore d'être celle du pardon. Mais cela n'a rien à voir avec la culture de l'excuse. Il y a pardon lorsqu'il y a faute. Le pardon ne nie pas la responsabilité, mais il accepte de ne pas en faire payer les conséquences. Dans la culture de l'excuse, il n'y a pas de faute. L'individu n'est pas responsable de ses actes. Il n'a rien à se faire pardonner. Tout au contraire de la culture de l'excuse, la théologie du pardon appartient à la culture de la responsabilité.




 

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