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L’élection au système majoritaire est un archaïsme

Paru dans 24 Heures le 31 mars 2021

L’élection au système majoritaire est un archaïsme

L’élection des municipalités par le peuple au système majoritaire pervertit la démocratie et nuit à la politique consensuelle qui fait la force de notre pays.

Jusqu’aux élections communales de 1977, les municipalités vaudoises étaient élues au suffrage majoritaire par le Conseil communal dans les grandes communes, le Conseil général dans les petites. Les élus veillaient à une certaine proportionnalité: à Lausanne, la droite majoritaire accordait trois sièges à la minorité de gauche.

À la suite de l’«affaire Mugny» (ndlr: démocrate-chrétien évincé de la Municipalité de Lausanne par le Conseil communal en décembre 1977), une initiative du PDC, approuvée par le peuple, a introduit l’élection des municipalités par le peuple, mais le système majoritaire a été conservé. Dès les élections suivantes, en 1981, les déséquilibres ont commencé. La droite lausannoise a fait élire cinq municipaux; après quoi, la gauche devenue majoritaire a progressivement imposé six de ses membres.

À l’échelon fédéral, c’est toujours le parlement qui élit les conseillers fédéraux. Il le fait dans un souci d’équilibre, qui fait l’admiration des autres pays: on parle d’un miracle helvétique. Les partis de droite, pourtant majoritaires s’ils s’allient, n’exercent pas le pouvoir de leur majorité en éliminant du Conseil fédéral les candidats de la gauche minoritaire.

Quarante ans après son introduction, il est temps de faire le bilan de notre système électoral vaudois et de dénoncer son archaïsme. Le système majoritaire était adapté à une période de guerre froide, au temps où le monde était divisé entre un bloc de gauche et un bloc de droite.

Depuis la chute du mur de Berlin et la dissolution de l’Union soviétique, les lignes sont beaucoup moins claires. Et des questions nouvelles apparaissent, qui échappent à l’opposition gauche-droite. L’écologie ou la politique européenne en sont de bons exemples. Le système majoritaire contraint les partis, au moment des élections, à constituer des blocs qui ne correspondent plus à la réalité actuelle; et très nombreux sont les électeurs qui ne s’y reconnaissent pas.

On notera au passage que le psychodrame vécu par les Verts lausannois n’aurait pas eu lieu dans un système proportionnel.

Des exemples en Suisse

Élire les municipalités ou le Conseil d’État au système proportionnel: l’idée n’est pas nouvelle. Plusieurs cantons le pratiquent, au moins pour les grandes villes. Le Tessin élit son Conseil d’État au suffrage proportionnel. Il est temps que Vaud y réfléchisse. La population s’indigne de l’arrogance des blocs majoritaires, de droite ou de gauche. Seul le parti qui en bénéficie – pour un temps – s’en félicite, jusqu’au jour où la majorité bascule.

Le système majoritaire est adapté à l’élection du gouvernement par le parlement. Il est pervers lorsqu’elle est faite par le peuple. Passons donc au système proportionnel, le seul qui s’adapte pacifiquement aux réalités d’une vie politique en constante évolution.




 

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